mercredi 6 mars 2013

Messaline (1959)

Vittorio Cottafavi, IT - 1959. Avec Belinda Lee, Spyros Focas, Arturo Dominici

Valeria Messalina est une jeune vestale romaine que l'ambition va emporter bien loin de sa vie de recluse. Elle fait la connaissance du beau centurion Lucius Maximus exactement la veille de ses noces avec l'empereur Claude. Les deux jeunes gens s'aiment dès le premier instant, mais le sort de Valeria est désormais scellé : les épousailles se dérouleront avec tout le faste impérial, et Valeria sera appelée désormais Messaline.
Lucius part pour l'Arménie avec sa légion. Pendant son absence, Messaline se transforme en une impératrice despotique et cruelle. Mais elle n'a jamais cessé d'aimer Lucius, et, à son retour, elle se donne à lui. Elle fait plus : par une série de mensonges, elle le persuade de trahir son empereur. Toutefois, ce ne sera que lorsque sa maîtresse fera assassiner son ami, l'intègre Aulus Celsus que Lucius Maximus commencera à entrevoir son erreur. Mesurant l'abîme de corruption où lui-même a sombré, il passera alors résolument dans le camps des adversaires de l'impératrice. Exaspérée, Messaline redouble de cruauté envers le peuple et même ses courtisans. Quoiqu'il lui soit facile de se venger de cet ancien amant, Messaline renonce toutefois à ordonner son exécution. Cette faiblesse - dictée par son amour, son premier amour - lui sera fatale. En effet, la conjuration qu'elle a organisée avec la complicité de Caius Silius, noble romain, représentant de l'opposition à Claude, s'achève dans le sang. Arrachant l'Empereur aux rets tendus par ses ennemis, Lucius et ses troupes écrasent les sbires de Messaline, et celle-ci mourra, poignardée sous ses yeux.
Lucius oubliera ces tragiques événements auprès d'une jeune chrétienne, Silvia, à l'égard de qui il éprouve un sentiment neuf et profond; à ses côtés, il trouvera enfin la paix en s'exilant volontairement dans la lointaine province d'Assyrie.
«Le personnage de Messaline ne m'intéressait pas du tout parce qu'elle était un cas pathologique, racontera plus tard Cottafavi. Elle manquait d'humanité. C'était une femme détraquée depuis le début. Elle ne regardait plus qu'au-dedans d'elle-même et pas au-dehors; incapable d'aimer ou de haïr, mais faisant les deux en même temps. C'est pourquoi elle a fait tuer les hommes qu'elle a aimés; elle cherchait le pouvoir d'une manière absolue. Ce que je préfère dans ce film, ce sont quelques scènes qui regardent avec attention la vie des Romains à cette époque. La séquence qui se passe à Rome durant les fêtes, où l'on voit sur une petite place deux comédiens en train de jouer du Plaute, Le soldat fanfaron. Il y a des gens qui sont assis sur des bancs par terre et les deux pauvres acteurs, qui n'ont me pas de scène, jouent devant des maisons, comme cela se passait dans le temps pour les spectacles populaires. Les gens qui ne pouvaient se payer les arènes assistaient à ces spectacles.» Dans la version de Cottafavi, Messaline se perd elle-même en sauvant celui qu'elle aime, femme fatale un peu fleur bleue (ce qu'elle fut probablement, historiquement), incapable de voir plus loin que le bout de son nez. Sur l'ordre de Caligula, qui voulait ainsi se moquer de son lourdaud d'oncle en lui donnant pour femme une superbe créature, la fille de Barbatus Messala, Valeria Messalina épousa le consul Claude en 40 (et non en 41, après la mort de Caligula, comme le voudrait le film). Une jeune fille de quinze ans et un quinquagénaire baveux ! L'association était explosive ! Contemplant son buste, Arthur Weigall lui trouvait un regard bovin. Plus stupide que méchante, Messaline se laissait dominer par ses appétits génésiques. Bien entendu, elle ne fit jamais partie du collège des Vestales. Ses aventures amoureuses firent les délices de Félicien Champsaur (L'orgie latine, 1903) et d'Alfred Jarry (Messaline, 1900). Il est vrai que les frasques de celle qui, sous le nom de Lysisca, faisait de l'abattage dans un bouge de Subure, rentrant chez elle à l'aube «le vagin encore roide», avaient de quoi stimuler l'imagination. Amoureuse du beau Caius Silius (le sinistre Arturo Dominici !), elle aurait fait croire à son naïf mari d'empereur qu'une prophétie avait annoncé la mort de son époux dans l'année. D'où que le benêt se prêta à une mascarade où il permettait à sa femme d'épouser officieusement... son amant. La manipulation découverte, le nouveau «mari» fut bien condamné à mort, et avec elle cette fine mouche trop maline, à qui on envoya un prétorien au glaive bien affûté ! Messaline avait alors vingt-trois ans.
La fille de Barbatus Messala et de Domitia Lepida laissait un fils, Britannicus, qu'elle avait eu de Claude. Elle était la cousine du petit Lucius Domitius, le futur Néron, et avait haï Agrippine qui, exilée par son frère Caligula, avait confié le petit Lucius Domitius (5 ans) à sa tante Domitia Lepida (la mère de Messaline, donc). On sait le tragique destin de Britannicus empoisonné par Agrippine, ou Néron, ou les deux, ou aucun des deux - car l'empoisonnement est indémontrable - mais tout de même décédé à... l'âge de 14 ans !
Messaline fut sous les traits de la comtesse italienne Rina di Liguoro la très méchante héroïne d'un film d'Enrico Guazzoni (Messaline, 1923) où elle veut faire sacrifier à Isis une pauvre ingénue. Ensuite, sous les traits de Gerta Walkyria elle sera la figure centrale de l'unique péplum brésilien jamais tourné (Messaline, Luiz De Barros, 1930). En 1937, Merle Oberon l'incarna dans le I Claudius inachevé de Josef von Sternberg (1937); et en 1951 ce sera Maria Felix, dans la version de Carmine Gallone, qui lui prêtera ses traits. Messaline y animait une faction anti-républicaine contre celle menée par l'intègre Valérius Asiaticus. Disgraciée par l'empereur, errant dans Subure, elle demandait finalement à un de ses anciens amants, le gladiateur Taurus, de l'aider à mettre fin à ses jours... Lorsqu'on découvrit son cadavre on crut au meurtre d'une simple prostituée (Messaline, 1951). On la retrouva ensuite interprétée par Susan Heyward dans Les Gladiateurs (1954), par Marilu Tolò dans Hercule contre les Mercenaires/Il gladiatore di Messalina (Umberto Lenzi, 1964) et par Sheila White dans le feuilleton I Claudius (1976). Après le succès de Caligula (1977) où sous les traits d'Anneka di Lorenzo et pour les besoins du film, elle se réconciliait avec sa vieille ennemie Agrippine (Lori Wagner) le temps d'une scène lesbienne assez hard, elle sera ensuite de toute une série de péplums érotiques au début des années 1980' (Caligula et Messaline, Messaline impératrice et putain, etc.).
Gentleman accompli, le latiniste Jean-Pierre Néraudau tentera de démontrer dans ses Louves du Palatin (Belles Lettres, 1988) qu'une femme de la famille impériale aurait difficilement pu s'adonner à toutes les fredaines que lui attribua cette malveillante raclure de bidet nommée Suétone. On ne plaisante pas avec l'honneur des dames ! Non mais !
Michel ÉLOY :  http://www.peplums.info
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